Causalité agentive (A)

Comment citer ?

Bianchi, Robin (2024), «Causalité agentive (A)», dans Maxime Kristanek (dir.), l'Encyclopédie philosophique, consulté le ..., https://encyclo-philo.fr/

Considérez les énoncés suivants : « La bombe a causé la destruction du pont » ; « L’explosion de la bombe a causé la destruction du pont » ; « Booth a causé la mort de Lincoln » ; et « Le tir de Booth a causé la mort de Lincoln ». Ces énoncés suggèrent que les objets, tels que les bombes ou les personnes, font partie de la catégorie ontologique des causes, au même titre que les évènements, comme le tir de Booth et l’explosion de la bombe. À première vue, le fait que les objets et les personnes puissent être des causes n’a rien de particulièrement surprenant. Cependant, les philosophes du XXe siècle ont fait preuve d’une extrême méfiance à l’égard de cette idée. Une majorité de philosophes ont trouvé l’idée même de causalité par des objets ou des agents inintelligible, à tel point que les théories standards de la causalité présupposent que les entités reliées comme causes à effets sont des évènements, ou encore des faits, des propriétés ou des états. Pourtant, cette hostilité à l’égard de la causalité des objets est relativement récente ; la causalité agentive semble, au moins jusqu’à Thomas Reid (1710-1796), avoir été la norme, et non le mystère. La mise à l’écart des objets et des agents de la catégorie de cause est-elle justifiée ? Un nombre grandissant de philosophes, les agentialistes (agent-causalists), soutiennent que non et cherchent à réhabiliter l’idée de causalité agentive (par des agents) et/ou substantielle (par des substances), tandis que d’autres, les évènementialistes (event-causalists), défendent que celle-ci est au mieux réductible à la causalité entre évènements, ou au pire que l’idée est incohérente. L’importance de cette question n’est pas négligeable, car elle revient à demander quels sont les moteurs du changement. En effet, nous voulons savoir si certains objets tels que les couteaux, les bombes, les animaux et les personnes sont parfois à l’origine du changement, ou si tout effet procède uniquement de changements antérieurs, d’évènements. Existe-t-il une relation causale, la causalité agentive ou substantielle, reliant objets et changements, différente des relations causales habituellement traitées par les philosophes de la causalité ? Quelle est sa relation avec la causalité évènementielle ? Et comment fonctionne-t-elle ?  Cette entrée propose un panorama des réponses apportées à ces questions. Elle se divise en six sections. L’introduction propose un bref survol historique de la notion de causalité agentive. La section 2 introduit les motivations théoriques et ordinaires derrière la causalité des agents. La section 3 présente les deux grandes familles de théories agentialistes. La section 4 parcourt les objections principales contre l’existence de la causalité agentive. La section 5 est consacrée à la question de savoir quelle est la source la plus fondamentale du changement, les substances ou les évènements, et elle présente certaines tentatives de réduire la causalité agentive à la causalité évènementielle et vice versa.  

Cette entrée propose un panorama des réponses apportées à ces questions. Elle se divise en six sections. L’introduction propose un bref survol historique de la notion de causalité agentive. La section 2 introduit les motivations théoriques et ordinaires derrière la causalité des agents. La section 3 présente les deux grandes familles de théories agentialistes. La section 4 parcourt les objections principales contre l’existence de la causalité agentive. La section 5 est consacrée à la question de savoir quelle est la source la plus fondamentale du changement, les substances ou les évènements, et elle présente certaines tentatives de réduire la causalité agentive à la causalité évènementielle et vice versa. 

 

Causalité agentive et substantielle

Agent, substance et pouvoir  

Lorsqu’on s’intéresse à la causalité agentive, il est important d’être clair sur ce que nous cherchons à établir ou à rejeter.
Premièrement, notons que des restrictions sont souvent appliquées au terme « d’agent » dans la littérature, et le terme dénote alors de façon restreinte tantôt les agents rationnels, tantôt les agents (moralement) responsables, et tantôt les personnes, ou encore les substances qui possèdent des pouvoirs duaux qu’elles peuvent (choisir d’) exercer ou ne pas exercer dans les même circonstances (Steward 2020). Toutefois, il existe également un usage non restreint et plus traditionnel du terme « agent », à contraster avec le terme « patient » et que nous adopterons dans la suite de cette entrée, afin de parler plus généralement d’agent causal, des choses à l’origine de changements (voir Ellis 2013 ; Harré 2013).  De fait, il est commun dans la littérature sur le libre-arbitre de commencer directement par une défense (ou une attaque) de l’idée de causalité par des agents rationnels ou libres. Cependant, il est communément admis que les agents rationnels ou libres sont des substances, et que si la causalité de tels agents existe, il existe alors de la causalité par les substances, que celles-ci soient rationnelles ou non, inanimées ou animées, que l’on appelle la causalité substantielle (Clarke 2017 ; 2003, 221 ; Nelkin 2011, 88 ; Mayr 2011, Ch. 8 ; Swinburne 2013, ch. 5 ; Jacobs & O’Connor 2013, 186 ; Michon 2022, 233 ; Breidenbach 2017). Certains agentialistes localisent la différence entre causalité agentive et causalité substantielle dans des exercices de pouvoirs causaux différents, la première étant une espèce de la seconde, tandis que d’autres la localisent dans la nature des substances (libres/rationnelles) qui exercent cette forme de causalité. Nous supposerons pour les buts de cette entrée que la causalité substantielle est présupposée par la causalité des agents libres ou des personnes. Et nous parlerons, sauf précisions, de causalité agentive pour parler de la causalité des substances, où ‘agent’ est compris dans le sens non restreint introduit ci-dessus.  
En ce qui concerne la notion de substance, il n’est pas clair que les auteurs concernés par notre sujet en aient la même compréhension. Dans cette entrée, nous en ferons un usage taxonomique en incluant dans cette catégorie des objets ordinaires plus ou moins larges comme les animaux, les tables, les êtres humains, les cailloux, les planètes, ou encore les microbes, les grains de sable ou les grains de pollen (Lowe 2005). Nous laisserons de côté la question de savoir quel est le critère nous permettant de démarquer cette catégorie (voir Koslicki 2015 ; 2018).  
Ensuite, il nous faut clarifier ce que nous entendons par « causalité évènementielle ». Dans la littérature sur la causalité agentive, lorsqu’il est question d’évènement, on entend souvent un changement dans une substance, ou l’exemplification d’une propriété par une substance à un temps (Vuille 2022). Cependant, les auteurs regroupent parfois sous l’étiquette de causalité évènementielle le rôle causal des propriétés, celui des états ou encore celui des faits. Nous utiliserons « causalité évènementielle » comme terme parapluie dans cette entrée afin de désigner toutes les formes de causalité dont le premier relata n’est pas une substance, et nous parlerons des « évènementialistes » pour parler de ceux qui nient que la causalité agentive existe ou qui cherchent à la réduire à de la causalité évènementielle.  
Finalement, il convient de ne pas présupposer d’emblée que notre question est de savoir si des substances sont parfois les premiers relata de la relation causale, au même titre que les évènements. Il reste possible que la causalité agentive soit une espèce différente de causalité appartenant au même genre que la causalité évènementielle. En effet, une réponse négative à cette question n’entrainerait pas que les substances ne produisent jamais du changement. De même, la question n’est pas de savoir s’il existe un type mystérieux de causalité au-delà de la causalité ‘ordinaire’ évènementielle. L’intuition selon laquelle la causalité agentive est un mystère est une contingence historique, et celle-ci découle en partie du fait que la causalité agentive est mal comprise, comme l’illustre le fait qu’elle est souvent associée soit au volitionisme (Lusson 2017), soit à une forme de dualisme cartésien, et donc que la question serait de savoir comment une substance immatérielle pourrait être une cause (voir Enç 2003 ; Markosian 1999, 260 ; O’Connor 1995, 178 ; Franklin 2016).  

Bref survol historique  

La notion de causalité agentive, loin d’être un produit du siècle dernier, remonte au moins jusqu’à Aristote. Parmi les choses qu’Aristote décrit comme causes se retrouvent les agents. Être un agent, c’est être un certain type de cause efficiente, c’est-à-dire une source de changement ou de repos (Physique II.3, 194b29-32 ; voir Coope 2004, 201 ; Métaphysique, delta.2, 1013a24-1014a15). Ainsi, de même que le soleil est cause de la lumière, le sculpteur la cause de la statue, et le soldat la cause de la mort de son ennemi, Dieu est la cause du monde (Taylor 1966, 11). Les scolastiques semblent avoir hérité de cette notion de causalité agentive qui se retrouve par exemple chez Saint Thomas d’Aquin (Löwe 2021), et Suarez (Anfray 2017), où il est supposé que l’exercice de pouvoirs causaux par des agents participe à toute causalité.  La causalité efficiente, d’après cette conception, n’est pas comme nous avons l’habitude de le penser une relation entre évènements ou états, mais plutôt une transaction entre substances (Kenny 1975, 108). Ainsi, la causalité n’est pas connectée avec l’idée d’uniformité, de régularité ou de loi de la nature (une idée que nous devons à Hume), et les causes efficientes sont pratiquement toujours supposées être des substances, et en particulier, des personnes. Au cœur de cette notion de causalité se trouvent les idées de pouvoir, d’exercice et de production. Une cause, typiquement une substance, donne naissance à un effet en vertu de ses pouvoirs, qu’elle exerce. Un effet procède de la cause exerçant son pouvoir ou sa puissance, typiquement, sur une autre substance, un « patient ».  
La production de l’effet met en jeu, selon cette conception, une forme de direction (directedness) qui n’est pas nécessairement celle du temps. Par exemple, nous pouvons dire qu’en brillant sur une pierre, le soleil la réchauffe, mais nous ne pouvons pas dire qu’en se réchauffant la pierre fait briller le soleil sur elle. Cette idée est parfois exprimée par la distinction entre pouvoir actif de produire du changement et pouvoir passif de recevoir le changement (Marmodoro & Mayr 2019). Ainsi, la causalité agentive a une direction : elle « va » nécessairement de l’agent (le soleil qui brille) vers le patient (la pierre qui se réchauffe).  Cette conception se retrouve chez les modernes comme chez Locke dans sa discussion sur les pouvoirs actifs (Essais, livre II, XXI), ou encore chez Kant qui affirme que c’est en vertu de leurs actions et de l’exercice de leurs pouvoirs causaux que les substances sont des causes (CRP, A204/B250 ; Watkins 2010). L’agentialiste le plus fameux et le plus influent est sans doute Thomas Reid (1710-1796). Ce dernier en adopte, toutefois, une conception assez restreinte, car il soutient que les seules vraies causes, c’est-à-dire les entités qui possèdent le pouvoir actif de causer du changement, sont dotées de volonté et d’intelligence. Or, comme il soutient parallèlement que tout changement dans le monde procède d’une cause efficiente, d’un « agent » au sens restreint, cela le conduit à l’idée selon laquelle tous les changements de notre univers procèdent des humains, d’anges ou de Dieu.  
Malgré une telle restriction, à l’époque de Reid, la causalité agentive va de soi et la causalité des évènements est considérée comme une innovation humienne d’une intelligibilité douteuse (Van Cleve 2015, 377 ; voir Groff 2012, 79). La situation est renversée au XXe siècle, où la notion de causalité agentive a, pour un temps, pratiquement disparu de la littérature philosophique, avant une première tentative de réhabilitation dans la seconde moitié du siècle par Richard Taylor (1966) et Chisholm (1964, 1966, 1971, 1976, 1979). Chez ces derniers, dans la lignée de Reid, il est supposé que la causalité évènementielle gouverne le monde naturel et que la causalité agentive n’est l’affaire que des êtres humains. Ils identifient ainsi la causalité agentive à la causalité immanente, c’est-à-dire à la production de changement « interne » à l’agent par l’agent, ou qui « reste dans l’agent », et la causalité évènementielle du monde naturel à la causalité transitive (transeunt), où la cause opère sur une substance externe à elle-même.
Leur tentative de réhabilitation est cependant un succès mitigé et elle est accueillie avec scepticisme par les philosophes acquis au cadre théorique néo-humien qui domine alors. Les critiques, comme Davidson (1971) ou Thalberg (1976), trouvent la notion de causalité agentive ainsi réintroduite inintelligible, incohérente ou incompatible avec un certain naturalisme philosophique.
À partir des années 1980 et 1990, la notion de causalité agentive se retrouve au cœur de deux projets bien distincts. D’une part, certains philosophes comme O’Connor (1995 ; 1996 ; 2000 ; 2005 ; 2009 ; 2012) ou Clarke (1993 ; 1996 ; 2003), qui suivent leurs prédécesseurs en maintenant l’identification entre causalité agentive et causalité immanente, développent des théories agentialistes du libre-arbitre libertarien : la causalité agentive devient alors la causalité des agents libres. De l’autre côté, certains philosophes (Bishop 1983 ; 1986 ; 1989 ; Alvarez & Hyman 1998 ; Steward 2009 ; 2011 ; 2012 ; 2014 ; Mayr 2011 ; Swinburne 2013 ; Hyman 2015), détachent la notion de causalité agentive de celle de causalité immanente, et proposent des théories causales de l’action et de l’agir dites antiréductionnistes. Ainsi, nous pouvons dès lors parler de deux doctrines de causalité agentive, que nous présenterons plus en détail dans la section 3. Tournons-nous maintenant vers les motivations qui sous-tendent la causalité des agents.  

Pourquoi la causalité agentive ?  

Nous pouvons ranger les raisons de penser que la causalité agentive existe en deux catégories. D’une part, les raisons provenant du sens commun et du langage ordinaire, et d’autre part, les raisons purement théoriques qui consistent à faire appel à la causalité agentive afin de faire avancer un problème philosophique. Les deux sous-sections qui suivent sont organisées en conséquence.  

Langage ordinaire, l’idée de causalité, et la phénoménologie

Nous pouvons déceler trois aspects du sens commun et du langage ordinaire qui reflètent la notion de causalité agentive : (i) certaines constructions linguistiques, notamment certains verbes d’action et certaines phrases d’action ; (ii) l’origine (psychologique) de l’idée de causalité ; et (iii) la phénoménologie de l’agir. Ces trois points sont traités respectivement dans ce qui suit.

Verbes causatifs  

Commençons par remarquer que le verbe « causer » n’est pas l’expression privilégiée de la causalité en français. On préfère par exemple dire « casser la vitre » plutôt que « causer le bris de la vitre ». Pour les besoins du texte, nous nous concentrerons sur un moyen particulièrement crucial d’exprimer la causalité : les verbes causatifs (voir Moeschler 2009 ; Schäfer 2009). Les verbes causatifs sont des verbes qui incluent dans leur signification la causalité. Nous les utilisons pour former des expressions du type « Audrey ouvre la porte », ou « le médicament guérit Henri », dans lesquelles ils apparaissent transitivement et où ils indiquent l’action de l’agent. Ces expressions impliquent d’autres expressions où ces verbes figurent intransitivement et qui indiquent le changement causé par l’agent. Ainsi, « Audrey ouvre la porte » implique « la porte s’ouvre », et « le médicament guérit Henri » implique « Henri guérit ». Parfois, la paire transitif-intransitif dénotant l’action et le changement est formée par deux verbes différents tels que « Booth tue Lincoln » et « Lincoln meurt ».  
Une thèse communément admise afin d’expliquer ce patron (pattern), parfois appelé alternance causale (causative alternation), est que ces verbes sont des façons de rapporter les divers changements que des agents causent (à ou sur des patients) (Strawson 1985, chap. 8 ; Thomson 1987 ; Martin et Schäfer 2014 ; Baglini et Bar-Asher Elitzur 2020 ; Levin 1993 ; Byerly 1979 ; Hornsby 2011 ; Kenny 1963 ; Parson 1994). Ainsi, pour reprendre respectivement nos deux exemples, les constructions formées par des verbes causatifs s’analysent, en nominalisant l’objet et le complément infinitif du verbe, comme : « Audrey cause l’ouverture de la porte » ou « le médicament cause la guérison d’Henri ». Le même point vaut pour d’autres langues, par exemple en anglais, « A raises B » peut se paraphraser comme « A causes the rising of B », ou « A kills B », comme « A causes the death of B ».  
Le point crucial pour notre propos est que l’analyse sémantique de ces verbes fait apparaitre de la causalité agentive, puisque les phrases contenant des verbes causatifs, lesquels prennent comme sujet des agents, impliquent des phrases d’après lesquelles des agents causent des changements. Ainsi, si des phrases telles que « Booth a tué Lincoln » ou « La bombe a détruit le pont » sont parfois vraies, et elles le sont sans doute, celles-ci impliquent qu’il existe de la causalité agentive (Chisholm 1976, 199 ; Steward 2012, 200-2 ; voir section 5).  

Perception et phénoménologie

Tournons-nous maintenant vers l’origine de l’idée de causalité. Dans la lignée des empiristes, nous pouvons demander de quelle impression subjective notre idée de causalité dérive. Toute une tradition, opposée à Hume sur ce point, partant de Wittgenstein jusqu’à Strawson, en passant par Anscombe, a soutenu que l’origine de notre idée de causalité provient des actions mécaniques (manipulations et impacts) dans lesquelles nous sommes engagés comme agent ou que nous subissons comme patient (Strawson 1985, 119 ; Anscombe 1993, 93 ; Wittgenstein 1976 ; Hacker 2007 ; Harré & Madden 1975 ; Hornsby 2011). Par exemple, nous ressentons la production d’effets tels que la torsion dans notre bras produite par l’haltère trop lourd qui en est la cause.
En fait, d’après les défenseurs de cette tradition, ce point s’applique également aux actions mécaniques qui ne nous impliquent pas : nous observons le bloc de pierre écraser la cabane, le bucheron abattre l’arbre, le couteau couper le pain, le pilote porter sa valise, etc. Dans au moins les deux derniers cas, nous n’observons pas deux évènements distincts, l’un succédant à l’autre (d’abord le mouvement du couteau, puis le changement dans la baguette), et pourtant, il semble que nous observons « l’efficacité », la production de changement (Searle 1983, 123). Ainsi, si nous percevons ces actions mécaniques, qui sont causales en ce sens qu’elles constituent des façons, pour des agents, de générer certains effets, nous percevons parfois de la causalité par des objets agissant sur d’autres objets.
Il semble que ce dernier point s’accorde bien avec le fait que le vocabulaire de l’observation que nous utilisons pour rapporter ces actions mécaniques est typiquement formé de verbes transitifs causatifs (« pousser » ; « tirer », « déchirer », « casser »), que d’ailleurs, les enfants semblent maitriser avant d’acquérir l’idée plus abstraite de causalité (Steward 2012, 202). Certains philosophes ont même maintenu, à la lumière de ces considérations, que la causalité agentive est conceptuellement antérieure à la causalité évènementielle (Hacker 2007, ch. 3). Notons que ça n’implique pas que nous percevions de connexion nécessaire ni que nous fassions l’expérience de « nomicité ». La thèse soutenue par ces auteurs est compatible avec l’idée que nous ne percevons pas la relation à laquelle se réfère le concept Humien de causalité (Chisholm 1964, 351). La plausibilité de l’idée selon laquelle nous pouvons percevoir la causalité dépend de ce qu’on entend par « causalité » (Guillon 2017, 85). Quoiqu’il en soit, les métaphysiciens hostiles à l’idée selon laquelle la causalité agentive fait partie du mobilier de notre monde peuvent accepter la priorité conceptuelle de celle-ci, tout en maintenant qu’elle est ontologiquement réductible et qu’elle est réalisée dans notre monde par des relations causales entre évènements (Bishop 1989 ; 2007).
Nous finirons par indiquer que d’autres agentialistes comme Reid et Locke ont identifié une source distincte à l’idée de causalité agentive qui ne réside pas dans notre perception des actions mécaniques. Selon eux, notre idée de causalité ou de production de changement ne peut pas dériver de l’observation d’évènements naturels extérieurs à nous, puisque nous ne pouvons alors qu’observer la continuation du mouvement, et non sa production (Locke, Essais, Livre II. XXI). Par opposition, nous dériverions l’idée de production de changement de la conscience que nous avons de nos propres volitions par le biais desquelles nous initions des chaines causales et des changements dans le monde extérieur ou dans notre esprit (Yaffe 2004). Autrement dit, ils identifient une source phénoménologique à l’idée de causalité : l’expérience de l’efficacité de nos propres volitions.
Dans leur lignée, certains philosophes ont défendu que la phénoménologie de l’action peut fonder la croyance (défaisable) que la causalité agentive existe (Guillon 2017 ; Nida-Rümelin 2007 ; 2018 ; Pereboom 2015). Ces derniers ont notamment mis en avant le fait que nous ne faisons pas, lorsque nous agissons, l’expérience d’un premier évènement (l’acquisition d’une intention par exemple), puis d’un second (un mouvement), que le premier cause (Morales 2023). Certains vont plus loin et affirment que le contenu de notre expérience est libertarien. Par exemple, nous ferions l’expérience d’être indéterminé. En somme, la phénoménologie de l’agir ne semble pas pointer dans la direction de l’évènementialisme ; ce dernier point est d’ailleurs contesté (Clarke 2019).
Pour résumer, nous trouvons des traces de la causalité agentive (i) dans nos façons d’exprimer la causalité, notamment à l’aide de verbes causatifs décrivant la production de changement par un agent, et (ii-iii) dans nos expériences perceptives, comme dans nos expériences à la première personne, d’actions.  

Disparition de l’agent : action et libre-arbitre  

Nous pouvons ranger les motivations théoriques derrière la causalité agentive en deux groupes : celles qui concernent l’action et celles qui concernent le libre-arbitre. Elles sont successivement traitées dans ce qui suit.  

Causalité agentive et action  

Du côté de l’action, la causalité agentive apparait en lien avec le problème de l’action, qui consiste à élucider la distinction entre les actions et les évènements (Brent 2017). Selon la théorie dite standard de l’action, qui est évènementialiste (event-causalist), les actions se distinguent des simples évènements par leur histoire causale. Les actions sont des évènements, typiquement des mouvements corporels, causés par des états ou des évènements mentaux rationalisant, c’est-à-dire pouvant figurer dans une explication (construite par un « parce que ») qui donne les raisons de l’agent de faire ce qu’elle a fait. Cette théorie repose sur l’intuition qu’il existe une connexion étroite entre causalité et explication. De fait, elle prend comme modèle nos explications de l’action, qui mentionnent typiquement des désirs, des croyances ou des intentions : « Booth a tué Lincoln parce qu’il désirait un changement de régime et croyait que tuer Lincoln était une façon d’y parvenir ». Ce faisant, elle permet d’éviter de postuler de la causalité agentive, qui est vue comme un concept obscur ou incohérent (voir Davidson 1971 ; Bishop 1983, 67).  
Sans surprise, les agentialistes se montrent insatisfaits par toute tentative de fournir une théorie de l’action évènementialiste. Deux problèmes très proches sont pointés du doigt : le problème des chaines causales hétéronomes et le problème des chaines causales déviantes.
Premièrement, le fait que mes mouvements soient causés par des évènements mentaux rationalisants n’équivaut pas au fait qu’il s’agisse de mon comportement. Nous pouvons imaginer une situation dans laquelle chaque fois que S forme une intention de F-er, un appareil dans son cerveau, qui détecte son intention, le meut ou produit des mouvements en vue de satisfaire l’intention de F-er. Dans ce cas, les mouvements de S sont bien causés par son intention : si S n’avait pas formé l’intention de F-er, ces mouvements ne se seraient pas produits. Pourtant, il semble que ces mouvements ne sont pas une action de S, mais plutôt quelque chose que l’appareil a fait avec le corps de S (Taylor 1966, 94 ; Bishop 1986, 240 ; O’Connor 2000, 48). Le problème, c’est que même si l’intention de F-er a causé ces mouvements, S ne les a pas produits, ou il n’a pas exécuté son intention, et il semble, en ce sens, ne pas avoir agi.
Un second problème similaire est celui des chaines causales déviantes qui vise les analyses évènementialistes de l’action intentionnelle. Par exemple, il semble possible que l’intention ou le désir d’un l’alpiniste le cause à lâcher la corde, sans que celui-ci ne lâche la corde intentionnellement, en provoquant de la nervosité et des tremblements dans ses membres qui lui font ensuite lâcher prise. Ces cas ont généré une industrie d’articles semblable aux cas Gettier en épistémologie. Le défi pour les évènementialistes est de pallier ces contre-exemples sans introduire de cause-agent.
Cependant, les contre-exemples incessants à ces tentatives d’analyses laissent à penser qu’une solution non-évènementialiste est à pourvoir, et c’est ce que proposent les agentialistes : il faut exiger que l’agent lui-même cause son mouvement (ou qu’il exécute son intention). Autrement dit, l’agent ne doit pas seulement vouloir F et croire qu’en faisant V, il fera advenir F, mais il doit faire advenir, c’est-à-dire, causer F (Bishop 1983 ; 1986).
De façon plus générale, les agentialistes se montrent suspicieux à l’égard de l’équivalence faite par les évènementialistes entre (a) l’agent fait advenir un changement et (b) des évènements ou états rationalisant de l’agent causent un changement (même de façon non-hétéronome et non-déviante). Les agentialistes supposent que les agents ne sont pas identiques à des collections d’états ou d’évènements mentaux, et ils refusent également que le rôle de l’agent soit joué par de tels états ou évènements (voir Franklin 2016 ; Rigato 2015). Or, s’ils ont raison de penser cela, il suit que les analyses évènementialistes de notre concept d’action sont vouées à l’échec puisque comme nous l’avons vu dans la section précédente, la causation de changement par des agents est au cœur de la signification de nombreux verbes d’action.
Ce dernier point ne se limite pas au langage, car si tel que le suggèrent les théories causales de l’action, agir suppose causer du changement, et que les agents ne causent jamais de changement, ces changements étant causés par des états ou des évènements, alors les agents n’agissent pas, ce qui est absurde. C’est ce qu’on nomme le problème de la disparition de l’agent en théorie de l’action, à ne pas confondre avec le problème de la disparition de l’agent dans le débat sur le libre-arbitre sur lequel nous allons revenir dans la prochaine sous-section (Hornsby 2004, 2008 ; Nagel 1993 ; Himmelreich 2021 ; Steward 2016).

Causalité agentive et libre-arbitre

Du côté du libre-arbitre, la causalité agentive est soutenue par l’intuition selon laquelle le fait que nous soyons parfois moralement responsables de nos actions implique que nous soyons des causes (Chisholm 1971, 33 ; 1964). Cette intuition constitue la base des théories agentialistes du libre-arbitre (et non de l’action) dont la version libertarienne est la plus fameuse. Commençons par une précision afin d’expliciter cette intuition. Ce qui est en jeu dans le débat entre agentialistes et évènementialistes quant au libre-arbitre n’est pas tant la définition de l’action, mais plutôt le contrôle que les agents ont sur leurs actions, décisions et choix. Les deux camps présupposent que la nature de ce contrôle est causale, et la question est alors de savoir comment comprendre la nature de la cause de nos décisions et choix requise pour que nous en ayons le contrôle, et par conséquent, nous en rendre responsables.
Selon les agentialistes sur le libre-arbitre, ni la nature indéterministe ni la nature déterministe des causes-évènements de nos actions ne saurait nous en donner le contrôle (voir Pereboom 2001 ; 2004 ; 2014a ; 2014b ; 2017 ; Michon 2022). Autrement dit, ni le déterminisme ni l’indéterminisme causal couplés à l’évènementialisme ne sauraient garantir que nous établissions (settle) nos décisions et choix, ou que ceux-ci soient de notre ressort. Si le déterminisme causal est vrai, nos décisions sont établies par une séquence causale d’évènements qu’on peut faire remonter loin dans le passé, et il semble que l’agent n’établisse pas le fait que sa décision se produise. D’un côté, si les causes-évènements antérieures à nos choix sont extérieures à nous, nos actions résultent purement et simplement de circonstances qui ne relèvent pas de nous. D’un autre côté, si elles sont intérieures à nous (nos états motivationnels par exemple), il semble, à moins que nous jouions un rôle causal dans leur production, que nous soyons poussés à l’action par des forces psychologiques qui ne relèvent pas de nous, et donc que nous n’établissons pas le fait que notre action se produise (Thalberg 1976, 219-220).
D’autre part, si l’indéterminisme causal est vrai, il semble que rien n’établisse le fait que nos décisions se produisent. Car si nos actions sont causées de façon indéterministe par nos états mentaux ou des évènements antérieurs, faut-il encore que nous puissions tirer parti des connexions plus lâches introduites entre les évènements par l’indéterminisme pour que nos actions soient de notre ressort (O’Connor 2009, 192 ; Griffith 2010). Autrement dit, la présence d’indétermination parmi les évènements-causes de nos décisions ne suffit pas à établir le fait que nous prenions une décision ou non, et le rôle de l’agent reste à expliquer. En conséquence, il semble que dans les deux cas (déterminisme et indéterminisme) nos actions ne soient pas de notre ressort. Autrement dit, nous n’établissons pas le fait qu’elles se produisent.  
Ce problème s’est également vu donner le nom de disparition de l’agent (Pereboom 2004 ; 2014b ; 2015 ; 2017 ; Clarke 2017 ; 2019 ; Runyan 2016). Pour éviter de le confondre avec le problème du même nom concernant l’action, nous le nommerons problème de la perte de contrôle. Le coupable, que nous retrouvons dans les scénarios déterministes et indéterministes, et sur lequel s’entendent agentialistes libertariens et compatibilistes, est l’évènementialisme. Ce qui manque pour garantir le contrôle de l’agent sur ses décisions et choix, c’est la causalité de l’agent.
Certains agentialistes libertariens ont défendu que cette causalité doive, en plus, être indéterministe (O’Connor 1993, 1995, 2000, 2009 ; Clarke 1995, 2000, 2003 ; 2005 ; Chisholm 1971, 1976). Cependant, l’ajout de l’indéterminisme est contesté, et certains agentialistes ont développé des modèles compatibilistes de la causalité de l’agent (Taylor 1966 ; Markosian 1999 ; 2012 ; Nelkin 2011). Selon ces derniers, causer son action suffit à garantir le contrôle pertinent pour la responsabilité morale. Dès lors, on peut se demander si l’agentialisme libertarien garantit davantage de liberté ou de contrôle que l’agentialisme compatibiliste.  
Pour résumer cette section, nous avons constaté que certains philosophes ont été conduits à accepter la causalité agentive en considérant le fait que la causalité évènementielle, selon eux, ne permet pas d’expliquer certains phénomènes tels que l’action et le libre-arbitre. Cependant, la convergence d’opinion parmi les agentialistes s’arrête sur l’inadéquation des théories évènementialistes de l’action et du libre-arbitre. Comme nous allons le voir dans la prochaine section, les familles de théories agentialistes diffèrent considérablement les unes des autres.  

Comment la causalité agentive fonctionne-elle ?

La présente section a pour but de parcourir les réponses données par les agentialistes contemporains aux questions suivantes : (i) qu’est-ce que la causalité agentive ? (ii) Que causent les agents ? Et (iii) quel est le rapport de la causalité agentive à la causalité évènementielle ? Deux doctrines ou familles d’agentialisme se distinguent par leurs réponses à ces questions et le but théorique qu’elles poursuivent : l’agentialisme classique (agency theory) et l’agentialisme large. La première fait appel à la notion de causalité agentive afin d’éclairer la relation qu’un agent entretient avec ses actions pour qu’elles soient sous son contrôle ; la seconde fait appel à la notion afin d’éclairer la relation entre l’agent et les changements dans le monde que celui-ci fait advenir.  
Avant d’examiner leurs différences, précisons les points sur lesquels les deux doctrines agentialistes s’accordent. Elles sont dites antiréductionnistes en ce qu’elles prennent la causalité agentive comme primitive (la notion n’est pas susceptible d’analyse en termes plus basiques) et causalement fondamentale (le phénomène n’est pas ontologiquement réductible à des relations causales entre évènements, faits ou états).  
Ensuite, les deux doctrines suivent la tradition en associant la causalité des agents aux notions d’efficacité, de pouvoir causal, et de production, et en identifiant la causalité agentive à l’exercice de pouvoir causal par un agent. Leurs tenants acceptent que la production soit primitive et indéfinissable. La nature de leur thèse engage les tenants des deux doctrines à admettre des substances dans leur ontologie, puisque les agents ne sont pas, par définition, des occurrents, mais des continuants. Dans ce qui reste de cette section, nous allons tour à tour exposer les deux doctrines.

L’agentialisme classique  

Les théories classiques contrastent la causalité agentive avec la causalité « ordinaire » ou évènementielle, qui est celle que l’on retrouve dans le monde naturel. La causalité agentive, selon ces théoriciens, est le propre des agents libres (ou des personnes) et non des substances en général. Ainsi, la notion d’agent prend un sens bien plus restreint ici.
En conséquence, si les théoriciens classiques affirment que la causalité agentive consiste en l’exercice du pouvoir causal d’un agent, ils donnent à cette idée un sens bien spécifique. Chez O’Connor et Clarke, deux représentants paradigmatiques de cette doctrine, toute causalité consiste en l’exercice de pouvoirs causaux, mais la différence entre la causalité évènementielle et agentive repose sur la nature du pouvoir causal que les agents possèdent (2003, 198-202 ; O’Connor 2000 ; 2009, 191). Autrement dit, si ces théoriciens admettent que la causalité est une affaire de pouvoirs causaux, et plus précisément des divers pouvoirs causaux des évènements (event-causal power), ils cherchent à faire valoir l’idée selon laquelle les agents intentionnels et libres possèdent le pouvoir distinct de causalité-agentive (agent-causal power). De ce fait, comprendre la causalité agentive d’après la doctrine classique revient à comprendre le fonctionnement du pouvoir de causalité-agentive.  
Comment ce pouvoir se caractérise-t-il ? Et comment diffère-t-il des pouvoirs causaux des évènements ? Pour les théoriciens classiques, la possession de certaines propriétés par une substance confère aux évènements qui l’impliquent le pouvoir causal de produire un changement donné. Par exemple, la vitesse, le poids, la forme et la quantité de mouvement de la balle confèrent à l’impact de la balle contre la vitre, un évènement, le pouvoir de causer le bris de la vitre. L’idée est qu’étant donné certaines circonstances et la possession de certaines propriétés par une substance, un évènement (un changement dans les propriétés de cette substance ou l’exemplification par la substance à un temps de propriétés) peut produire un certain effet. Il est, dès lors, supposé que les pouvoirs causaux « ordinaires » sont exercés par des évènements (Clarke 2003, 197 ; O’Connor 2000, 71-73).
Les évènements, d’après ce modèle, tendent à produire des effets : le fait qu’un évènement produise un effet est nécessairement associé à une probabilité déterminée (le cas limite étant déterministe). Et ces pouvoirs évènementiels sont dirigés vers des effets donnés, tels que le pouvoir de l’impact vers le bris de la vitre. Le pouvoir de causalité-agentive diffère sur ces points des pouvoirs causaux évènementiels. Premièrement, la possession de certaines propriétés par un agent lui confère à lui et non à un évènement le pouvoir de causalité-agentive. En ce sens, les propriétés qui fondent le pouvoir de causalité-agentive sont dites choice-enabling : elles donnent le pouvoir à un agent de causer une fourchette d’effets délimités par les circonstances extérieures et ses états motivationnels. Le pouvoir de causalité-agentive n’est donc pas dirigé vers un effet donné.
De plus, dans les versions libertariennes de cette théorie, le fait que l’agent produise un effet ou exerce son pouvoir n’est pas associé à une probabilité déterminée. Celle-ci varie continuellement du fait que l’agent est impacté par des influences externes et internes (Clarke 2003, 193 ; O’Connor 2000, 73 ; O’Connor 2009, 198). En ce sens, les évènements inclinent l’agent à agir, mais ne nécessitent pas son action.  
Que causent les agents ? D’après ces théories, l’effet que l’agent cause est un changement interne à lui-même, l’apparition d’un état d’intention d’accomplir un acte résolvant un état d’incertitude quant à l’action à entreprendre (O’Connor 2000 ; 2009) ; l’intention de faire une action faisant partie de son répertoire d’actions (Bishop 1983, 74) ; une décision (Clarke 2003, 196 ; Pereboom 2004) ; un choix (Donagan 1987) ou une volition (Reid 1788). La causalité agentive est alors essentiellement de la causalité immanente (interne à l’agent) (Chisholm 1964 ; Taylor 1966 ; Morales 2023), qu’on oppose à la causalité évènementielle qui est dite transitive où la cause produit un effet extérieur à elle-même. Notons qu’il est souvent supposé que le changement que l’agent cause est son action (Taylor 1966 ; Chisholm 1964 ; 1971 ; Pereboom 2014a ; 2014b ; 2015 ; Markosian 1999 ; 2012).
La différence entre causalité évènementielle et agentive étant ainsi tracée, il reste à répondre à la question de savoir comment celles-ci interagissent, et notamment s’il est possible qu’un évènement soit causé de façon immanente par un agent et de façon transitive par un évènement. Dans ces premiers écrits sur la question, Chisholm supposait qu’un seul et même évènement ne peut pas avoir les deux types de causes. Or, forcé de constater que les mouvements de notre corps sont causés par des évènements cérébraux, il nia alors que nous causons de façon immanente les mouvements de notre corps. Afin de conserver le rôle causal de l’agent dans sa théorie, il supposa alors que nous causons les évènements cérébraux qui causent à leur tour nos mouvements. Mais cela le conduit à nier également que ces évènements cérébraux soient causés par d’autres évènements, ce qui semble peu plausible (Chisholm 1964, 19f ; 1969, 216 ; 1971, 38).
D’autres philosophes comme Markosian (1999) ou Taylor ne sont pas dérangés par la possibilité de double-causation d’un évènement, et ce dernier utilise même l’idée pour distinguer les actions libres (celle uniquement causée de façon immanente) des actions non-libres (1966, 127 et 114). Clarke, dans un article de 1996, soutient que l’agent et ses raisons causent conjointement son action, et donc que celle-ci peut avoir à la fois une cause-agent et une cause-évènement.
Enfin, certains agentialistes, comme O’Connor, ne rencontrent pas le problème. Selon lui, l’agent suffit à produire son intention, et si celle-ci admettait d’autres causes, elles devraient se trouver en amont de la cause-agent. Or, pour causer l’intention de l’agent, un évènement devrait causer l’agent, et d’après O’Connor, la notion de causer une substance n’a pas de sens clair (2009, 197 ; 2000, 52).
Remarquons que si cette position évite d’admettre la possibilité de double-causation, l’adopter revient à admettre que les agents, à strictement parler, ne causent que le premier élément de certaines chaines causales, ce qui restreint passablement le rôle causal de l’agent dans le monde, puisque ce dernier ne cause ses mouvements ou ce qui en découle que par l’intermédiaire de la causalité évènementielle.
En résumé, la doctrine agentialiste classique soutient (i) que la causalité agentive consiste en l’exercice du pouvoir causal des agents de causer des changements internes à eux-mêmes, (ii) typiquement des états mentaux ou des évènements cérébraux qui sont identifiés soit à une action, soit à une partie d’une action, et (iii) que cette causalité immanente contraste avec la causalité transitive évènementielle du monde naturel.

L’agentialisme large

Les tenants de cette version de l’agentialisme entendent détacher la causalité agentive de certaines des thèses jugées parfois obscures traditionnellement associées à l’agentialisme classique. Nous pouvons utiliser ces thèses afin d’introduire l’agentialisme large, à commencer par (1) l’idée selon laquelle l’ordre causal naturel est évènementiel tandis que la causalité agentive est spécifiquement humaine ou le propre des causes libres.  
Le refus de l’élargissement des causes-agents au monde naturel chez les agentialistes classiques découle d’une certaine forme de naturalisme. En effet, certains évènementialistes comme David Velleman ont soutenu que notre vision scientifique du monde implique que les évènements sont causés uniquement par des évènements (Velleman 1992, 467 ; Bratman 2001). Cependant, il faut noter qu’il n’est pas évident que nous devrions considérer cette position comme une doctrine scientifique plutôt que philosophique. En effet, ni la thèse selon laquelle tous les évènements sont causés ni qu’ils sont causés par des évènements, n’impliquent que les agents ne sont pas des causes. Ce qui n’est, d’ailleurs, impliqué par aucune théorie en sciences naturelles (Alvarez et Hyman 1998, 228 ; Meixner 2017). Ainsi, il n’est pas question, selon les nouveaux agentialistes, de concilier naturalisme et causalité de l’agent, mais plutôt de rejeter une forme erronée de naturalisme qui demanderait une ontologie de la causalité purement évènementielle.  
Ensuite, l’agentialisme large se détache de (2) l’idée que les agents causent uniquement des changements internes à eux-mêmes. Ses tenants refusent l’identification de la causalité agentive à la causalité immanente. La causalité agentive pouvant être tout aussi transitive que la causalité évènementielle, le contraste entre les deux se marque donc différemment. Ce point rapproche l’agentialisme du sens commun, car si l’action et la causalité agentive vont de pair (comme nous allons le voir dans un instant) et que les actions comme sculpter une statue, abattre un arbre, tirer sur une cible ou encore soulever une pierre, consistent (au moins en partie) à changer un objet extérieur, alors les agents causent parfois des changements dans des objets extérieurs à eux-mêmes. Et ce, même si l’agent doit souvent se changer lui-même en première instance.  
En général, les tenants de la seconde doctrine nient que les évènements sont puissants, qu’ils possèdent des pouvoirs causaux, ceux-ci n’étant que des changements et non leur source, et ils affirment que la causalité agentive est propre aux entités puissantes, qui peuvent agir et exercer leurs pouvoirs, ce dont les évènements sont incapables (Lowe 2009, 341 ; Lowe 2008 ; Michon 2022, 244 ; Steward 2012 ; Meixner 2017 ; Ayers 1968). Cette idée semble reposer sur une certaine compréhension de l’idée de pouvoir causal d’après laquelle posséder un pouvoir causal revient à être capable d’agir ou de s’engager dans certaines activités (voir Groff 2021, 84).
De fait, ce sont les substances que nous décrivons comme puissantes, comme capables d’agir ou d’être actives, par exemple, comme corrosives, magnétiques ou explosives. Et appliquer l’idée ‘d’exercice de pouvoir’ aux évènements semble relever de l’erreur de catégorie. Les évènements ne peuvent certainement pas agir, ils ne peuvent pas se déplacer, porter, lancer ou encore détruire. Ils peuvent peut-être causer des destructions et des déplacements, par exemple, mais ils déclenchent ces changements en se produisant, et se produire n’est pas une façon d’agir ou une activité. Certains agentialistes refusent l’idée selon laquelle les évènements sont des causes et vont jusqu’à dire qu’une ontologie purement évènementielle serait une ontologie sans causalité digne de ce nom (Lowe 2008 ; Meixner 2017 ; Jacobs et O’Connor 2013). Nous considérerons cette position plus tard.
En conséquence, le contraste entre nos deux types de causalités se marque ainsi : les substances causent des changements en agissant, tandis que les évènements causent des changements en se produisant (by occurring), les premiers ne pouvant pas se produire (ils ne sont pas des occurrents, mais des continuants), les seconds ne pouvant pas agir (ils ne sont pas porteurs de pouvoirs). De ce fait, ces agentialistes n’acceptent pas la conception de la causalité évènementielle mise en avant par certains tenants de la doctrine classique selon laquelle les évènements ont le pouvoir de produire des changements.  
L’agentialisme large se détache également (3) de la thèse selon laquelle les agents peuvent causer de façon immanente une action sans rien faire d’autre, c’est-à-dire sans agir ou sans causer un autre changement, et (4) de la thèse selon laquelle les agents causent leurs actions ou des parties de celles-ci. L’idée qu’une relation causale irréductible puisse tenir entre l’agent et son action ou entre l’agent et des évènements cérébraux ou leurs correspondants mentaux, a semblé obscure à certains. Il semble que nous n’ayons pas d’idée claire du fonctionnement d’un tel mécanisme : comment l’agent peut-il simplement produire de tels changements ou causer ses actions immédiatement ?  
En réaction, les tenants de l’agentialisme large adoptent l’une des deux positions suivantes. Certains soutiennent que la structure de la causalité agentive n’est pas ‘A cause E’ où A est un agent, mais plutôt « A cause E en V-ant » où « V » indique une façon d’agir ou une activité (Lowe 2008 ; Dancy 2017 ; Prichard 1949 ; Skow 2018). D’autres identifient les instances de causalité agentive aux actions (Steward 2012 ; Mayr 2011 ; Hyman 2015 ; Alvarez & Hyman 1998 ; Paoletti 2016 ; 2018 ; Stout 2007 ; 2010 ; Coope 2007 ; Swinburne 2013 ; Breidenbach 2017).
La première de ces options implique que certaines actions n’incluent pas de causalité agentive, il s’agira typiquement des actions basiques, celles que l’on fait sans en faire une autre, telles que directement lever son bras. La seconde option implique que les causations de changements par des agents sont des actions, et donc que ce qui est causé par l’agent ne peut pas être son action ou un composant de celle-ci, puisqu’une instance de causation ne peut pas être un de ses relata. Peu importe l’option adoptée, l’agentialisme large implique qu’il n’y a pas d’instances de causalité agentive qui ne sont pas des actions ou qui ne sont pas supposées par une action.  Certains défenseurs de l’agentialisme large choisissent de réserver le terme de « causalité agentive » pour parler de causalité intentionnelle, c’est-à-dire de la causalité faite par des substances capables de se représenter différentes lignes de conduite et d’agir en vue de satisfaire des désirs (Mayr 2011 ; Swinburne 2013 ; Nelkin 2011). Cependant, il est généralement admis qu’il ne s’agit là que d’une espèce du genre plus large de causalité substantielle. Les substances inanimées comme du poison ou une bombe sont capables de tuer, et donc de causer la mort d’être vivant. De même, la distinction entre les causes dites libres et les causes non-libres ou naturelles ne correspond plus à la distinction entre causalité évènementielle du monde naturel et causalité immanente des personnes. Par exemple, Jacobs et O’Connor soutiennent que le caractère unique des causes libres tient au type de substance qu’elles sont, à savoir des substances conscientes influencées par des raisons, et au type d’effet qu’elles produisent, typiquement des intentions d’agir pour certaines raisons (2013, 186). Or selon eux, toute causalité est causalité substantielle.
Cela dit, soulignons que la question de la causation double se pose également pour nos seconds agentialistes. Cependant, c’est un problème qui va dans les deux sens et l’on peut tout aussi bien en conclure qu’il n’y a pas de causalité évènementielle comme nous le verrons plus bas. Certains agentialistes ont proposé que les deux types de causalité soient complémentaires ou interdépendants (Hyman 2015), ou encore qu’il n’y a pas de bonne raison de penser qu’elles entrent en conflit (Mayr 2011 ; Steward 2012 ; Whittle 2016).
Une question importante que nous avons laissée de côté est de savoir à quelle catégorie ontologique appartiennent les choses que les agents causent. Il n’y a guère de consensus sur ce point, certains pensent que les agents causent des évènements compris comme transition d’un état de choses à un autre comme la levée d’un bras (la transition du bras au repos au bras étant en l’air) ; d’autres qu’ils causent des faits ou des états finaux comme le fait que mon bras soit en l’air (Stout 2010 ; Coope 2007 ; Kenny 1963) ; et d’autres encore qu’ils causent des processus (Dancy 2017).  
En somme, la nouvelle doctrine soutient (i) que la causalité agentive consiste en l’exercice du pouvoir des substances de causer du changement, (ii) que ces changements ne sont pas (nécessairement) internes à l’agent, et (iii) que la causalité agentive contraste avec la causalité évènementielle en ce que cette dernière ne consiste pas en l’exercice de pouvoirs causaux.  

Les objections contre la causalité agentive  

Le dénominateur commun des deux doctrines reste que des substances sont des causes. Cette section vise à parcourir les objections majeures que rencontre cette thèse.

L’argument de la régression de Davidson

Dans son fameux article « l’Agir », Davidson affirme qu’il existe un lien étroit entre action et causalité. Cependant, il reste convaincu que la notion de causalité évènementielle, bien qu’elle puisse nous expliquer, selon lui, comment « l’agir peut se diffuser des actions primitives [des mouvements du corps] aux actions décrites en d’autres termes », ne peut pas nous expliquer le sens fondamental de la notion d’agir (1971, 79). Considérant alors l’idée selon laquelle la causalité agentive pourrait rendre compte de la relation entre un agent et son action, il offre un dilemme aux agentialistes : la causation de l’action par l’agent (agent-causing) soit (a) introduit un évènement distinct de l’action, soit (b) n’en introduit pas. La première branche entraine une régression et la seconde implique que la notion de causalité agentive est tout sauf éclairante. Considérons-les tour à tour.
Supposons que la causation par l’agent soit un évènement distinct et antérieur à l’action. Cet évènement est à son tour, ou bien une action ou bien il n’en est pas une. S’il est une action, nous avons introduit une action supplémentaire afin d’expliquer le lien entre l’agent et notre première action, et la question se pose alors de savoir quel est le lien entre cette nouvelle action et l’agent. Si cette action n’est pas causée par l’agent, la causalité agentive ne rend pas compte de la relation entre un agent et son action. Si celle-ci est causée par l’agent, il existe alors un évènement supplémentaire : la causation de cette action par l’agent. Et, si celui-ci est à nouveau une action, une régression s’amorce, puisque nous devons maintenant dire que pour faire une action, un agent doit en faire une autre et ainsi de suite pour en accomplir une infinité (Alvarez & Hyman 1998, 222). La causation par l’agent ne peut donc pas être une action sous peine de régression. Or, si la causation par l’agent de son action n’est pas une action, alors il est possible qu’un agent cause quelque chose sans rien faire, et la notion d’une causation par un agent qui n’est pas une action est obscure selon Davidson. En conséquence, la causation par l’agent n’est pas un évènement distinct de l’action.
Supposons maintenant que la causation de son action par l’agent n’introduise pas d’évènement distinct de l’action. Dans ce cas, « la causation de l’action A par l’agent » ne peut pas servir d’analyse à « l’agent fait A », puisque rien n’est ajouté lorsque nous disons que l’agent cause son action au fait qu’il la fasse (Bishop 1983, 71). Dire que l’agent cause son action revient à dire que l’agent est l’agent de son action. Or cela est une suggestion vide selon Davidson (1971, 80). Ainsi, si la notion de causalité agentive n’est pas incohérente (a), celle-ci est au mieux inutile ou peu éclairante (b).
Nous pouvons répondre en rejetant la supposition de Davidson selon laquelle les agents causent leurs actions. Notons que ceci revient déjà à rejeter bon nombre des versions de l’agentialisme classique, en particulier celles de Chisholm et de Taylor qui soutenaient que les agents causent leurs actions. L’action est (au moins en partie) constituée par une instance de causalité agentive dont l’agent est un relata, et puisque ce qui constitue une action est, selon cette option, une instance de causalité agentive l’action ne peut pas être un relata de cette relation. Plutôt, l’action est la causation par l’agent d’un changement, typiquement un mouvement corporel (Bishop 1983, 71 ; O’Connor 1995, 181 ; O’Connor 2000, 72). Ainsi, nous évitons la régression consistant à dire que pour faire une action nous devons en faire une pluralité, et nous évitons également de dire qu’il est possible de causer quelque chose sans agir, puisqu’agir est (au moins en partie) causer un changement. Il semble alors que la première branche du dilemme de Davidson soit évitée.  
Qu’en est-il de la seconde ? Une réponse commune consiste à dire que l’agentialisme n’offre pas une analyse réductrice de l’action en termes de causalité agentive. Certains concepts ne se prêtent pas à une telle analyse. Leur élucidation passe parfois par une analyse holistique ou connective qui consiste à dégager les critères d’applicabilité du concept et la structure conceptuelle dont celui-ci fait partie (Strawson 1985 ; Bishop 1983, 72 et 1986, 228 ; Hyman 2015, 42–43 ; Thalberg 1976, 229). Or, ce que l’agentialiste avance c’est qu’il existe une connexion essentielle entre agir et causer un changement.  

L’argument de la connexion explicative

Notre second argument concerne la connexion entre causalité et explication. Lorsqu’il est dit qu’un agent ou une substance cause un effet, il est normalement le cas que cette substance n’aurait pas causé cet effet si elle n’avait pas été impliquée dans un évènement, ou si celle-ci n’avait pas été telle et telle. Par exemple, une voiture inerte qui touche un mur ne peut pas démolir celui-ci. C’est seulement lorsqu’elle acquiert une certaine quantité de mouvement qu’elle peut le détruire en fonçant dedans. Or, ce qui fait la différence quant à la destruction du mur est l’acquisition de cette quantité de mouvement et pas la voiture. La vraie cause n’est donc pas la voiture, mais l’évènement de la voiture en mouvement ou le fait que celle-ci acquiert une quantité de mouvement donnée (Humphreys 1989, Campbell 1990 ; Searle 2001, 82). Cette ligne d’argumentation apparait très plausible, notamment du fait que nous supposons généralement qu’il existe une connexion étroite entre causalité et explication. Lorsqu’on cherche à déterminer « la vraie cause » d’un certain effet C dans une certaine situation, nous cherchons normalement l’élément qui a fait la différence dans le fait que C se soit produit par rapport à une situation où C ne se serait pas produit. Or, ces éléments sont habituellement des évènements, ou des faits à propos des substances et non les substances elles-mêmes. De ce fait, la causalité agentive nous forcerait à admettre qu’il existe des causes qui n’expliquent pas leurs effets. L’argument peut se formuler ainsi :   

(P1) Les causes expliquent leurs effets     
(P2) Les substances n’expliquent pas leurs effets.     
(C) Les substances ne sont pas des causes.  

En réponse, certains agentialistes nient (P1) et font remarquer deux éléments. Premièrement, on ne peut pas inférer qu’un objet A n’a pas fait une certaine chose F, à partir du fait que si A n’avait pas été tel et tel, alors A n’aurait pas fait F (Steward 2011, 392). Deuxièmement, même si nous acceptons que les propriétés et les évènements fassent un meilleur travail explicatif que les substances, il ne suit pas que ce sont les propriétés ou les évènements qui effectuent le travail causal et non la substance. Cela dépend de la vérité de deux thèses supplémentaires, à savoir que les propriétés ou évènements sont puissants, c’est-à-dire qu’ils possèdent des pouvoirs causaux, et que les substances sont impuissantes, c’est-à-dire qu’elles n’effectuent pas de travail causal. Or, il s’agit de deux thèses métaphysiques, et il faut se garder, comme l’indique Helen Steward, de commettre l’erreur de confondre métaphysique de la causalité et heuristique de l’explication (Steward 2011, 395 ; Clarke 2003, 200). En effet, demander « la vraie cause » d’un effet, c’est demander quel est le facteur causal le plus saillant dans un contexte explicatif donné et non pas identifier les entités qui ont contribué causalement à sa production.
Toutefois, l’agentialiste n’est pas forcé d’admettre que les causes-substances n’expliquent rien, ce qui revient à nier (P2). Pour voir pourquoi, il faut distinguer les différents rôles explicatifs que jouent certaines entités dans les explications causales d’effets. Nous pouvons distinguer : (1) expliquer qui ou quoi est à l’origine du changement ; (2) expliquer comment le changement s’est produit ; et (3) expliquer pourquoi le changement s’est produit (Byerly 1979, 65-66). Pour illustrer, on peut demander : (1) qui ou quoi a brisé la vitre ? Tom, et la balle (qu’il a lancée), qui sont des substances. (2) Comment la vitre a-t-elle été brisée ? Par le jet de la balle par Tom ; il a cassé la vitre en la lançant. Ici, on mentionne des évènements ou des actions. (3) Pourquoi la vitre s’est-elle brisée ? Elle s’est brisée parce que la balle avait une certaine quantité de mouvement, parce que la vitre était fragile, parce que Tom a exercé une certaine force. On mentionne ici des faits et des propriétés.  
Helen Steward classifie les entités figurant dans ces explications de la façon suivante : (1) les moteurs (movers), qui sont des substances ; (2) les déclencheurs (makers-happen), qui sont des évènements, et (3) les facteurs (matterers), qui sont des faits ou propriétés (2012, 210). À la lumière de ces distinctions, il semble clair que nous cherchons parfois une explication causale en termes de moteurs. On peut s’imaginer que le shérif cherche à connaitre l’agent qui a causé la mort de la victime et l’instrument de sa mort (le couteau, le pistolet, le poison) ; tandis que le légiste identifie les déclencheurs (coups de couteau, ingestion de poison) et les facteurs (lésion aux organes vitaux, manque d’oxygène, quantité de poison) qui expliquent la mort. Les moteurs n’expliquent pas pourquoi ni comment un effet se produit, mais ils indiquent la source du changement où chercher les réponses aux questions (2) et (3) (Harré et Madden 1975). Il semble qu’on ait besoin de ces trois catégories de causes pour rendre justice à tout ce que nous voulons dire sur la causalité. Si Steward a raison, nous devrions rejeter cet argument.

L’argument de la généralité

L’argument que nous allons maintenant discuter est motivé par le Généralisme à propos de la causalité selon lequel les instances individuelles de causalité exemplifient toujours des principes causaux généraux. Nous pouvons le formuler ainsi :  

(P1) Les causes et effets sont connectés par des lois.
(P2) Aucune loi ne connecte les substances à des effets.
(C) Les substances ne sont pas des causes.

L’idée derrière la seconde prémisse est la suivante : les expressions qui se réfèrent à des substances particulières ne peuvent pas servir d’antécédents dans des conditionnels ou des contrefactuels servant à exprimer des lois. En effet, ces expressions n’ont pas une structure propositionnelle, tandis que les antécédents des conditionnels ont une telle structure. Cela nous fournit une raison de penser que les substances ne sont pas connectées à des effets par des lois (voir Steward 2012, 216 ; Michon 2022, 247-68).
En ce qui concerne la première prémisse, elle admet deux lectures. D’après une première lecture, (P1) revient à dire que lorsqu’une cause particulière A cause un effet particulier B, cette instance de causation est couverte par une loi. Cependant, s’il s’agit de la bonne lecture de (P1), on peine à voir pourquoi les substances ne peuvent pas satisfaire ce principe. Certains agentialistes comme Clarke ont défendu que les substances causent des effets en vertu de propriétés causalement pertinentes, et que des lois peuvent couvrir l’instanciation de ces propriétés et les effets (2003, 191-92). D’autres vont même plus loin en soutenant que les lois peuvent s’analyser ou s’expliquer en termes des pouvoirs des substances (Swinburne 2013, chap. 5 ; Watkins 2010, 523 ; 2005). D’après cette position, les lois dérivent de la nature des substances et les substances exercent leurs pouvoirs en accord avec leur nature. S’ils ont raison de penser cela, les instances de causalité substantielle sont couvertes par des lois.  
D’après une seconde lecture de (P1), la prémisse nous dirait que seules les entités auxquelles se réfèrent les expressions figurant comme antécédents de conditionnels peuvent être des causes. Ce qui, avec la deuxième prémisse, nous donne la conclusion. Cependant, il n’est pas clair que nous devions accepter une telle lecture de (P1). On pourrait rétorquer que si certaines entités sont des causes en vertu du fait qu’elles sont le type d’entité auquel se réfèrent les antécédents de conditionnels que nous trouvons dans des lois, il ne suit pas que toutes les causes sont des causes pour la même raison (Michon 2022, 247). Affirmer que seules ces entités sont des causes revient à présupposer qu’il n’y a qu’un seul type de cause et que ce type de cause n’est pas agentif. Or, établir une telle affirmation demande un argument supplémentaire et en tant que tel, l’argument n’est pas conclusif.

L’argument Broad-Ginet de la datation des causes.

Il existe plusieurs variantes de la présente objection qui peut être dirigée contre au moins trois thèses : (1) la thèse selon laquelle les continuants et donc les substances, peuvent être des causes ; (2) la thèse selon laquelle les évènements causés par des agents n’ont pas de cause-évènement ; et (3) la thèse selon laquelle les causations par les agents (leurs actions) ne sont elles-mêmes pas causées. Nous nous concentrerons sur (1). Une façon relativement directe de formuler l’argument est la suivante :     

(P1) Les causes expliquent le fait qu’un effet se soit produit quand il s’est produit.
(P2) Les substances n’expliquent pas le fait qu’un effet se soit produit quand il s’est produit.
(C) Les substances ne sont pas des causes.  

On remarquera la proximité de cet argument avec celui de l’explication mentionné plus haut. La première prémisse de l’argument exprime une restriction que C.D. Broad applique aux causes (1952, 218) : une cause doit être telle que son existence ou le fait qu’elle se produise explique pourquoi son effet s’est produit quand il s’est produit. Les substances étant des continuants, elles ne se produisent pas, et leur existence ne peut pas expliquer pourquoi un évènement qu’elles auraient causé se produit à une date donnée.
Certains agentialistes acceptent la restriction de Broad sur les causes, et ils ont tenté de nier (P2). Les pouvoirs causaux sont exercés par des agents à des moments donnés, et l’effet se produit quand il se produit, car l’agent a exercé son pouvoir à un moment donné (O’Connor 2000, 74 ; Clarke 2003, 202). Cependant, on peut rétorquer que même si ce qui explique que l’effet se soit produit à un moment donné est le fait que l’agent ait exercé son pouvoir à une certaine date, rien n’explique ensuite le fait que l’agent ait exercé son pouvoir à ce moment-là (Ginet 1990). En fait, s’il a une explication, le fait que l’agent ait exercé son pouvoir à ce moment est expliqué par des déclencheurs, des évènements, typiquement l’obtention de certaines circonstances chez les êtres inanimés, et l’acquisition de certaines raisons chez les humains.  
Une réponse moins concessive consiste à rejeter la restriction de Broad et à nier (P1). S’il est clair qu’il faille en appeler aux causes déclenchantes pour expliquer certains faits temporels concernant les effets, il n’est pas évident qu’il faille restreindre la classe des causes aux déclencheurs. Ceci nécessite un argument supplémentaire. De plus, nous pouvons rappeler ici la tripartition des causes proposée par Steward, qui permet également d’éviter cet argument (Steward 2012, 221 ; 2016 ; O’Connor 2000, 75-76). Ce que les causes-substances expliquent est le fait que l’effet se soit produit, mais pas le fait qu’il se soit produit à ce moment.  

L’argument de la force motivationnelle  

Les agentialistes ont souvent considéré les explications par les raisons comme téléologiques et non-causales (Reid 1788 ; Taylor 1966). Autrement dit, les raisons expliquent l’action non pas en contribuant causalement à celle-ci, mais en identifiant le but pour lequel l’action a été entreprise. Les agentialistes héritent ici d’un problème qui concerne les anti-causalistes en général à propos du débat sur les raisons et les causes. Il semble y avoir une différence entre avoir une raison d’agir et agir pour cette raison. Or, la différence repose plausiblement sur le fait que dans le second cas, mais pas dans le premier, la raison (ou l’état mental de l’agent dont le contenu est cette raison) cause l’action. Cette distinction n’est pas tracée par le fait que l’agent cause son action ou un effet.  
Une première réponse proposée par O’Connor (1995), qui affirme que les agents causent leurs intentions d’agir, consiste à dire que les intentions que l’agent cause sont des intentions non pas d’agir, mais d’agir en vue de satisfaire une certaine raison R (que ce dernier possédait avant d’agir). Ainsi, la différence entre avoir une raison R d’agir et agir pour cette raison R est expliquée par le fait que dans le second cas, mais pas dans le premier, l’agent cause une intention dont le contenu est d’agir pour R.  
Néanmoins, cette réponse n’est pas complètement satisfaisante parce qu’elle ne touche pas à la difficulté plus générale pour l’agentialisme qui est d’expliquer comment réconcilier le fait que les agents causent leurs actions ou les effets de celles-ci avec l’intuition que nos états motivationnels ont une certaine force qui nous pousse à agir. Autrement dit, qu’est-ce que cela veut dire pour les raisons d’avoir une force motivationnelle si ce n’est « causer à agir » (O’Connor 2012, 315) ?
Différents modèles ont été proposés pour répondre à ce problème. Dans un article de 1993, Clarke soutient que quand un agent agit (librement), son acquisition des raisons R d’agir cause son action. Autrement dit, les actions sont causées par l’acquisition des raisons R de l’agent à un moment donné. Ce que l’agent cause, d’après ce modèle, n’est pas l’action, mais le fait que l’action soit faite pour les raisons R, ce qui revient à dire que l’agent cause le fait que ses raisons R causent son action.
Toutefois, il n’est pas clair qu’on puisse causer des relations causales. On peut peut-être causer le produit d’une relation causale ou son premier relata. Or, si l’agent cause ses raisons (ou leur acquisition), il semble alors que les raisons n’influencent pas l’agent, et qu’elles n’exercent pas de force motivationnelle sur son activité, ce qui laisse inexpliqué leur pouvoir motivationnel. Clarke modifie sa position dans un article de 1996 dans lequel il soutient que l’agent et l’acquisition de raisons R causent conjointement son action. L’idée est que les raisons inclinent l’agent vers une certaine action, sans être suffisantes pour la causer, et que l’agent renforce cette propension en causant son action parallèlement à ses raisons. Le modèle proposé consiste à dire que les raisons de l’agent tendent vers différentes actions et que l’agent se range derrière l’une de ses raisons qui devient alors causalement efficace et produit son action. Le problème de cette suggestion est qu’elle met l’agent en compétition avec ses raisons et lui retire la maitrise de son action, car celle-ci dépend de la force des raisons qui contribuent avec lui à la produire (Michon 2022, 240).
Finalement, O’Connor adopte une autre approche afin d’expliquer la force motivationnelle des raisons. Selon lui, le fait que l’agent soit conscient d’une raison d’agir augmente la propension objective qu’il a d’initier une certaine action, et la force motivationnelle consiste en cette augmentation. Cette suggestion permet de conserver l’idée que l’agent est l’unique facteur causal derrière son intention ou son action tout en admettant que les raisons exercent une force motivationnelle sur l’agent (2012, 116-17). Faut-il encore pour que cette solution soit recevable que les raisons (ou autres facteurs internes à l’agent) ne nécessitent pas l’action ni ne suffisent à celle-ci, ce qui semble demander le rejet du déterminisme.

L’argument de la difformité  

La plupart des agentialistes acceptent que d’autres entités que des substances puissent être des causes. Or, comme nous l’avons vu en présentant les deux doctrines agentialistes, il semble que le pouvoir de causalité-agentive, dans le premier cas, ou les pouvoirs causaux des substances en général, dans le second, diffèrent de ce que nous trouvons dans les instances de causalité évènementielle. On pourrait alors objecter que cela implique que la causalité est un phénomène radicalement désunifié (Clarke 2003, 208), et qu’il faut, pour cette raison, rejeter la causalité agentive pour lui préférer la causalité « ordinaire » des évènements.  
Si l’argument de la difformité reste hautement controversé, il est aussi relativement mal compris. En effet, celui-ci n’a pas nécessairement comme conclusion le rejet de la causalité agentive, bien que l’admission par les tenants de la doctrine classique que la causalité du monde naturel est évènementielle, puisse laisser penser le contraire. Il prend plutôt la forme suivante :  (P1) La causalité agentive existe. (P2) La causalité évènementielle existe. (P3) Si P1 et P2, alors la causalité est un phénomène désunifié. (P4) La causalité est un phénomène unifié. Donc, en supposant que (P3) et (P4) soient vrais, nous devons rejeter (P1) ou (P2). Sans surprise, les évènementialistes rejettent (P1), tandis que les agentialistes rejettent une des trois prémisses restantes (Lowe 2008 ; Swinburne 1997 ; Paoletti 2018 ; Meixner 2017). Les pluralistes causaux, comme Helen Steward dont nous avons présenté la position plus haut, rejettent (P4), car ils pensent qu’il n’y a pas d’unique relation causale et que c’est une erreur que de supposer que notre concept de cause se réfère à une classe unifiée d’entités (Steward 1997 ; 2012 ; 2014). D’autres rejettent (P2) en soutenant que les causes sont puissantes et que ce n’est pas le cas des évènements (Lowe 2008 ; 2009 ; 2002 ; 2001 ; Meixner 2004). Quoiqu’il en soit, ceux qui cherchent à résoudre l’objection en rejetant (P1) ou (P2) auront pour tâche de montrer comment réduire l’un des deux types de causalité à l’autre. Dans la dernière section, nous nous tournons brièvement vers de telles tentatives.  

L’argument de la surdétermination explicative

Si la causalité agentive existe, alors nous sommes parfois les causes de certains effets tels que les mouvements de notre corps. Pourtant, il ne fait aucun doute que les mouvements de notre corps sont également causés par des évènements neurophysiologiques. La double-causation de certains effets fait apparaitre la menace de surdétermination explicative ou causale. Illustrons le cas avec la surdétermination causale.
Si la causalité agentive existe, on pourrait avoir deux explications causales, une mentionnant un agent et l’autre mentionnant des évènements neurophysiologiques, d’un seul phénomène. Qui plus est, ces explications seraient indépendantes ou autonomes, puisque l’explication par la causalité agentive pourrait être donnée même avec l’ignorance totale des évènements neurophysiologiques. Or, si l’on accepte qu’aucun évènement ne peut avoir plus qu’une explication complète et indépendante, il semble qu’il faille rejeter l’explication par la causalité agentive, puisque le statut de l’explication par des causes neurophysiologiques n’est pas en cause (Mayr 2011, 244-45).  
Une première réponse consiste simplement à rejeter l’idée selon laquelle un évènement ne peut avoir qu’une explication complète et indépendante, ou de façon similaire, l’idée selon laquelle il ne peut avoir qu’une cause suffisante. Cependant, cette réponse n’est pas satisfaisante, car l’agent et les évènements neurophysiologiques qui causent son mouvement ne sont pas indépendants, et nous ne supposons pas généralement que le fait que nos mouvements soient produits à la fois par nous et par ces évènements soit une coïncidence.
Dans cette veine, Alvarez et Hyman soutiennent que l’explication d’un évènement par un agent et celle par des causes neurophysiologiques sont complémentaires. Nous pouvons expliquer pourquoi l’agent possède le pouvoir de causer un mouvement parce que nous pouvons décrire les mécanismes neurophysiologiques à l’œuvre quand l’agent agit (1998, 232).
Néanmoins, on pourrait objecter que même si la capacité de l’agent à produire un mouvement peut être expliquée par des mécanismes neurophysiologiques, cela ne rend pas moins redondante l’explication par la causalité agentive d’un mouvement. En réponse, Mayr ajoute que ces explications ne sont pas complètes, c’est-à-dire qu’elles ne capturent pas tous les aspects de la production de l’effet qui sont à expliquer. En effet, la causalité agentive ne nous dit pas pourquoi l’agent a le pouvoir de produire untel effet, et les causes neurophysiologiques manquent de nous dire que la production de l’effet constituait une action (Mayr 2011, 246). Ainsi, l’explication par la causalité agentive n’est pas redondante, elle nous informe du fait que la production d’un certain mouvement constituait une action.  
 

Réduction et fondamentalité

Une multitude de candidats auxquels réduire la causalité agentive ont été proposés : la causalité évènementielle, la causalité factuelle, mais aussi la causalité des pouvoirs (Buckareff 2011 ; 2017 ; Ingthorsson 2021 ; Kuykendall 2021). Historiquement, le débat s’est surtout centré sur la causalité évènementielle et nous suivrons la littérature sur ce point. Ceux intéressés par une discussion des différentes tentatives de réduction peuvent se référer au livre d’Erasmus Mayr (2011, ch. 8). Dans ce qui suit, nous présenterons brièvement certaines tentatives de réduction (i) de la causalité agentive à la causalité évènementielle et (ii) vice versa.  

Réduire la causalité agentive

Il est généralement admis, même par ses détracteurs, que la question intéressante n’est pas de savoir si nous possédons un concept de causalité agentive ou si celle-ci existe, mais plutôt de déterminer si elle est fondamentale, réductible à la causalité évènementielle, ou encore définissable en termes de cette dernière (Clarke 2017, 77). En effet, de nombreux réductionnistes acceptent que le langage ordinaire reconnaisse que les substances sont des causes (Mele 2015, 20 ; 2017 ; Franklin 2018 ; 2013 ; Kane 1996, 122 ; Hornsby 1980 ; Davidson 1993, 287) et certains acceptent que même si le concept de causalité agentive n’est pas analysable, la causalité agentive n’est pas fondamentale (Bishop 2007 ; 1989).
Avant d’entrer plus en avant dans les arguments réductionnistes, remarquons que la réduction conceptuelle ou sémantique est, dans ce débat, étroitement liée à la réduction ontologique. Chisholm soutenait, par exemple, qu’une réduction ontologique passerait par une réduction sémantique, la question étant alors de savoir s’il on peut exprimer, sans rien perdre de leur sens, les énoncés où figure typiquement un verbe d’action causatif tels que « Jones tua son oncle » en un ensemble d’énoncés dans lesquels uniquement des évènements sont dits être des causes et qui ne présupposent pas qu’il y ait quoi que ça soit dont une substance ait pu être la cause (1976, 199). Le fait que Jones cause la mort de son oncle fait partie de la signification de l’énoncé « Jones tua son oncle ». Or, si l’on peut exprimer « Jones tua son oncle », en faisant fi de l’énoncé « Jones causa la mort de son oncle », et en substituant à ce dernier énoncé un ensemble d’énoncés où ne figurent que des évènements-causes, la réduction sera, selon le test de Chisholm, acquise. Dans sa lignée, la réduction ontologique de la causalité agentive à la causalité évènementielle a été motivée en grande partie par une réduction sémantique ou conceptuelle.
Le plus fameux de ces arguments est celui de l’ellipse (Menzie 2009, 773 ; 1989, 59-60 ; Searle 2001, 82 ; Davidson, 1971, 75). On pourrait le formuler ainsi : si tous les énoncés portant sur des instances de causalité agentive sont elliptiques pour des énoncés portant sur des instances de causalité évènementielle, alors nous n’avons pas besoin de postuler de causes-substances pour que ces énoncés soient parfois vrais. Par exemple, l’énoncé « le serpent a causé la mort de Marie » serait une ellipse de « la morsure du serpent a causé la mort de Marie » où le sujet du verbe causer dénote un évènement et non plus une substance.
Une réponse que nous devons à Ann Whittle consiste à dire qu’il n’est pas vrai que nous n’avons pas besoin de postuler de causes-substances pour rendre vrais les énoncés portant sur des instances de causalité agentive (2016, 7-8). La phrase « l’écoulement du poison dans l’oreille du roi a causé sa mort » indique que le poison (une substance) fait partie de l’évènement dénoté par le sujet du verbe causer. Si l’écoulement du poison dans l’oreille du roi a causé sa mort, ce n’est pas seulement en vertu de la présence du poison, qui est nécessaire pour que la phrase soit vraie, mais également parce que ce dernier, qui est létal, semble avoir causé sa mort. Or, pour montrer que le poison n’est pas une cause dans ce cas, il faudrait encore montrer que c’est la propriété d’être létal et non son possesseur qui est une cause de la mort. En l’état, l’énoncé « l’écoulement du poison dans l’oreille du roi a causé sa mort » présuppose qu’une substance, le poison, a causé quelque chose, ce qui manque le test de Chisholm.
Une seconde réponse que nous devons à John Hyman revient à nier l’antécédent selon lequel les énoncés portant sur des instances de causalité agentive sont elliptiques (2015, ch. 2). Une ellipse consiste en l’omission d’un mot ou d’un groupe de mots dans une phrase, lequel est nécessaire afin de compléter sa structure grammaticale ou d’exprimer sa signification. Comme nous l’avons vu dans la section 2, la causalité agentive fait partie de la signification de certaines phrases contenant des verbes causatifs d’action. Par exemple, « Brutus causa la mort de César » fait partie de la signification de « Brutus tua César ». Or, la phrase « Brutus tua César » est grammaticalement complète, à l’inverse de l’expression « au plaisir de te revoir ». Les réductionnistes soutiennent que pour exprimer la signification complète de cette phrase nous devrions la modifier ainsi : « un acte de Brutus tua causa la mort de César ». Cependant, Hyman objecte que cette phrase ne peut pas avoir la même signification que « Brutus tua César ». Car, si c’était le cas, les phrases suivantes auraient la même signification : (1) « Brutus déplaça sa main » et (2) « un acte de Brutus déplaça causa le mouvement de sa main ». Or, (1) n’implique pas (2), parce que déplacer sa main est un acte que l’on peut faire directement, sans rien faire d’autre, sans acte antérieur causant le mouvement de la main.
Cependant, même si l’on admet que les énoncés portant sur des instances de causalité agentive ne sont pas elliptiques, il reste possible de tenter de réduire les instances de causalité agentive à des instances de causalité évènementielle en identifiant les premières aux dernières. La question est alors de savoir si l’on peut toujours trouver un évènement-cause lorsqu’il semble qu’une substance cause quelque chose.  
Dans cette veine, les évènementialistes avancent typiquement que l’évènement-cause du mouvement dans le cas, par exemple, où Brutus déplace sa main, est une cause interne, un évènement mental ou cérébral. Nous pourrions donc réduire la causalité de Brutus en l’identifiant à la causalité d’évènements mentaux l’impliquant. De même, on pourrait réduire la causalité des substances en général à celle d’évènements les impliquant.  
Cependant, cette stratégie n’est pas généralisable. Mayr propose de considérer le cas suivant (2011, 210-12) : un aimant est attaché à l’intérieur d’une boite métallique qui l’isole de son environnement, empêchant ainsi les interactions avec des objets extérieurs à la boite. Une petite balle métallique est projetée à l’intérieur de la boite à un certain angle, et en entrant dans la boite, elle est attirée par l’aimant et change alors de direction. L’aimant est la cause de la déviation dans la trajectoire de la balle. La question est la suivante : à quel évènement peut-on réduire la causation du changement de trajectoire de la balle par l’aimant ? Considérons 4 candidats : (1) le fait que la balle soit attirée par l’aimant ; (2) le fait que la balle entre dans la boite ; (3) le fait que la balle ait été mise en mouvement ; et (4) le fait que l’aimant ait acquis son magnétisme.
L’évènement (1) est l’évènement qu’est l’interaction causale entre l’aimant et la balle, c’est-à-dire le fait que l’aimant manifeste son pouvoir causal, et donc le fait que l’amant cause la déviation de la balle. La réduction est donc impossible, car l’évènement même est constitué par l’aimant jouant un certain rôle causal (Whittle 2016). L’évènement (2) est une cause-évènement du changement dans la trajectoire de la balle. Mais la causation par l’aimant et la causation par cet évènement ne peuvent pas être identiques, car cet évènement pourrait être la cause de ce changement même si l’aimant ne l’était pas, par exemple, une souffleuse à air aurait pu envoyer la balle vers l’aimant sans que celui-ci exerce son magnétisme qui aurait pu être masqué. (3) et (4) sont également hors de question pour la même raison. En conséquence, il n’y a pas d’évènement-cause candidat pouvant se substituer à la causalité de l’aimant.
Notons finalement qu’il existe encore deux autres approches réductionnistes. Nous pouvons distinguer deux stratégies : (1) l’identité et (2) l’identification. La première stratégie revient à nier que les agents sont des substances et à affirmer la thèse humienne selon laquelle nous sommes identiques à des collections d’états ou d’évènements psychologiques (Campbell 2006). La seconde, la plus souvent adoptée, revient à dire que l’agent s’identifie, par un mécanisme psychologique, à un état ou évènement mental qui joue son rôle causal (Frankfurt 1988; Watson 1975 ; Ekstrom 2000 ; Bratman 1996 ; 2001 ; Velleman 1992 ; Franklin 2017 ; Moran 2002). On notera que cette seconde stratégie n’est pas déployable dans le cas des substances non humaines. Sans surprise, ces deux positions ont été vivement critiquées par les agentialistes qui ont soutenu qu’elles ne pallient pas la disparition de l’agent (Mayr 2011, ch. 3-4 ; Michon 2022, 222 ; Hinselwood 2013).
En somme, ces désaccords remontent en partie à des désaccords ontologiques plus profonds quant à l’acceptation ou non d’une ontologie purement évènementielle. S’il semble assez clair qu’une réduction conceptuelle ait peu de chances d’aboutir, le débat sur la réduction ontologique est, lui, encore bien vivant. Dans ce qui reste de cette entrée, nous nous tournerons brièvement vers la réduction inverse : celle de la causalité évènementielle à la causalité agentive.


Réduire la causalité évènementielle

Nous avons vu dans la section 2 que certains agentialistes, en partant de considérations sur l’acquisition de notre idée de causalité suggèrent que la causalité agentive est conceptuellement antérieure à la causalité évènementielle (Hacker 2007 ; Lowe 2008, 134–135 ; Bishop 1986). On peut dès lors se demander si l’on peut réduire (ontologiquement) la causalité évènementielle à la causalité agentive. Diverses propositions ont été faites à ce sujet (Paoletti 2018 ; Meixner 2004), mais nous nous concentrerons sur celle d’E.J. Lowe qui est la plus connue. Tout d’abord, remarquons que pour qu’une telle réduction soit plausible, il ne faut pas entendre « agent » dans le sens restreint d’agent responsable et rationnel, mais plutôt dans le sens « d’agent causal », comprenant dès lors les êtres inanimés, les animés et les végétaux. Dans cette veine, Lowe propose que nous expliquions en quoi consiste la causalité évènementielle en termes de causalité agentive ainsi :  

(I)    Un évènement c cause un évènement e si, et seulement si, il y a un agent, A, et une façon d’agir F, tels que c consiste en A F-iant et A, en F-iant, a causé e.

Pour illustrer, prenons « l’écoulement du poison dans l’oreille du roi causa sa mort ». Selon l’analyse (I), il y avait un agent, le poison, et une façon d’agir, s’écouler, tel que l’écoulement du poison dans l’oreille du roi consiste en l’action du poison de s’écouler dans son oreille, et le poison, en s’écoulant dans son oreille, a causé la mort du roi.  
En réponse, nous pouvons mettre en avant que cette analyse échoue s’il existe des instances de causalité évènementielle qui ne consistent pas dans le fait que des agents agissent d’une certaine manière. Un exemple que nous devons à P.F. Strawson est le suivant : il y a eu un éclair, et cela n’implique pas que quelque chose a fait cet éclair (que quelque chose a « flashé ») (1959, 54). Or, l’éclair aurait pu être la cause d’un autre évènement. Néanmoins, Lowe répond que si un éclair, dans le cas d’un orage, n’est pas exactement comme l’éclair de lumière d’un phare, en ce que le dernier consiste dans le fait que le phare éclaire et non le premier, il est plausible de considérer que l’éclair de l’orage consiste en de multiples agents agissants ensemble d’une certaine façon, dans ce cas, en de multiples particules chargées électriquement qui, collectivement, déchargent leur électricité dans le sol (2008, 137).
Une seconde difficulté apparait dès lors qu’on demande comment, d’après (I), comprendre la relation causale entre les évènements neuronaux qui précèdent nos mouvements et ces derniers. L’analyse de Lowe semble nous dire que le premier type d’évènement consiste en certaines parties du corps de l’agent agissant d’une certaine façon, par exemple, des neurones qui s’activent ou envoient des signaux, des muscles qui se contractent, etc. Jusqu’ici, il ne semble pas y avoir de problème, puisque l’envoi des signaux par les neurones a pu causer le second évènement (le mouvement corporel) qui plausiblement consiste en un bras ou une main de l’agent se déplaçant. L’analyse rend donc compte de cette relation.
Cependant, les agents auxquels nous faisons appel pour comprendre cette relation ne sont pas l’agent humain, mais des parties de son organisme, et la question se pose alors de savoir comment il est possible que l’agent humain et ses parties corporelles, toutes deux, causent le mouvement de son corps.  
S’il semble que l’activité causale de nos parties soit une condition nécessaire à la nôtre, nous avons encore besoin d’un argument pour éviter la conclusion que l’activité causale des êtres complexes ne se réduit pas à l’activité causale de leurs parties. Certains agentialistes ont proposé une théorie de la relation entre le travail causal des parties et celui de l’agent humain ou animal (voir Mayr 2011, chap. 9 ; 2017 ; Steward 2012, chap. 8 ; Rigato 2017 ; Morales 2023). Nous laisserons ce point de côté ici.  
Nous pouvons relever une autre difficulté pour l’analyse de Lowe. Celle-ci semble supposer que la structure de la causalité agentive est toujours « S cause e en F-ant » où F est une façon d’agir. Or, dans le cas des actions basiques, telles que directement lever son bras, il n’y a pas d’action que l’agent accomplisse par le biais de laquelle il cause la levée de son bras. Ainsi, au moins certains énoncés portant sur la causalité agentive ont la forme « S cause e ». Et il semble alors difficile d’analyser les énoncés où des désirs, intentions ou autres évènements mentaux d’un agent apparaissent comme causes. Cependant, Lowe, qui adhère également à une théorie volitioniste de l’action, répond que même dans le cas où l’agent lève son bras directement, il cause la levée de son bras en voulant (by willing) le lever (2008, 147 ; voir aussi Stuchlik 2013). Ainsi, on pourrait dire que l’intention ou la volition cause le mouvement m seulement si, l’agent, en voulant, a causé le mouvement de son bras. Cela fait déprendre la réduction de Lowe de l’idée selon laquelle vouloir est une action et plus généralement du volitionisme, une thèse fortement controversée.   Finalement, la réduction ontologique, qu’elle aille dans un sens comme dans l’autre, reste un sujet hautement controversé et aucun des projets réductionnistes n’a encore été couronné de succès. Cette constatation a poussé certains philosophes à soutenir une forme de pluralisme : aucune causalité n’est plus fondamentale que l’autre. Elles sont, selon ces derniers, complémentaires ou interdépendantes : les évènements ne peuvent se substituer aux substances dont le rôle est d’exercer le pouvoir de causer du changement, et les substances ne peuvent se substituer au rôle de déclencheur que les évènements jouent (voir Hyman 2015 ; Steward 2012 ; Mayr 2011).  

Conclusion

Ce que nous pouvons tirer de ce panorama des discussions touchant à la causalité agentive est que celle-ci mérite d’être prise sérieusement par les philosophes, qu’ils travaillent sur l’action ou sur la causalité de façon plus générale. Car comme nous l’avons vu, elle ne peut pas s’éliminer aussi facilement que les philosophes l’ont cru au XXe siècle. Il reste à prouver que le virage vers la causalité évènementielle constitue un progrès du point de vue de notre compréhension de l’action, du libre-arbitre et de la causalité.

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